Chronique

Un accueil presque parfait

Hyova /

Hyova

Militant associatif.

Nadia F. Luna Kubota - IMG_0555 - Cité nationale de l’histoire de l’immigration

Réfugiés, migrants, droit d’asile, entre peur et fantasmes, la France et le discours politico-médiatique oscillent au gré des tragédies quotidiennes, des sondages et du bon vouloir des voisins européens. Dans les coulisses d’un bienveillant accueil des réfugiés, chronique d’un déni ordinaire.

« Tapez 1 pour les enfants morts noyés, tapez 2 pour les enfants en bonne santé » c’est peut-être ce qu’il aurait fallu faire depuis le départ. Quelques jours après s’être découvert une soudaine empathie pour des victimes dont elle est en partie responsable, la France Eternelle et Universelle® a héroïquement acceptée de laisser vivre 25 000 réfugiés dans son doux pays. La République "a sucé sa part du tuyau" migratoire, le débat est clos, le problème résolu, fermez le ban.

Droit d’inventaire

Mais les fanfaronnades du moment, qui ne sont là que pour donner la réplique à l’émotion des jours précédents dans cet énième épisode médiatique du sauveur blanc, cachent assez mal la misère qui attend les 25 000 réfugiés censés arriver (sans compter toutes celles et ceux qui viendront ou sont déjà là « illégalement »). Outre qu’il rappelle tristement que le sort des racisés (ceux qui sont désignés comme tels), ne devient sujet politique que lorsqu’ils ont des morts à exhiber, ce discours médiatique reprend le schéma des récits historiques du pouvoir blanc : la justice française a fini par acquitter Dreyfus c’est qu’elle n’était pas si antisémite, la France a fini par abolir la traite négrière ce qui compte au moins autant que de l’avoir pratiquée, la France a fini par accorder les indépendances ce qui l’absout définitivement de tout droit d’inventaire.

Qu’ils soient conscients ou non, concertés ou non, peu importe puisque ces discours médiatiques, politiques et historiques ont la même conséquence : l’occultation (par réaction ou par anticipation) des savoirs et des expériences qu’apportent l’histoire et l’actualité des luttes de l’immigration. L’absence ou l’indignité des logements, la précarité du travail, les multiples formes de contrôles policiers et administratifs, les violences physiques comme symboliques sont déjà le lot quotidien d’une majorité d’immigrés racisés et de leurs descendants depuis maintenant près d’un siècle. L’exercice d’autosatisfaction intense où l’Europe Démocratique® est ce César magnanime qui choisit arbitrairement de ne pas baisser le pouce devant quelques malheureux morts-vivants du désert ne fait ainsi que taire à l’avance les quelques voix autorisées qui ne manqueront pas de constater les bidonvilles, la sur occupation de foyers, l’exploitation non déclarée, les diverses formes de discriminations et de violences etc.

Récit médiatique du sauveur blanc

Qu’ils soient nommées migrants ou réfugiés, ceux à qui l’asile sera accordé deviendront quoi qu’il en soit eux aussi des indigènes domestiques, c’est-à-dire avant tout des corps rentables. Rentables économiquement puisque soumis à diverses formes d’exploitation : travail non déclaré ou précaire, souvent inférieur au niveau de qualification surtout dans le cas d’exils liés à la guerre. Rentables politiquement comme cibles privilégiées de multiples discours de gauche comme de droite (néo-laicardisme, nationalisme etc). Il y a donc une double urgence à agir et questionner les conditions concrètes de l’accueil promis (sans doute encore plus concernant le traitement des migrants dits illégaux mais les leviers d’action sont encore bien moindres) d’une part parce que le récit médiatique du sauveur blanc évacue publiquement la question et d’autre part parce que le profit qui se dessine pour l’Etat et les patrons ne risque aucunement de provoquer un bouleversement de cet aspect de l’exploitation coloniale.

Contre-attaqueR

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